Author Archives: Eric Schulthess
Valencia #1 : la paella de La Murciana
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Les oeufs au plat
Il est terrible
le petit bruit de l’oeuf dur cassé sur un comptoir d’étain
il est terrible ce bruit
quand il remue dans la mémoire de l’homme qui a faim
elle est terrible aussi la tête de l’homme
la tête de l’homme qui a faim
quand il se regarde à six heures du matin
dans la glace du grand magasin
une tête couleur de poussière
ce n’est pas sa tête pourtant qu’il regarde
dans la vitrine de chez Potin
il s’en fout de sa tête l’homme
il n’y pense pas
il songe
il imagine une autre tête
une tête de veau par exemple
avec une sauce de vinaigre
ou une tête de n’importe quoi qui se mange
et il remue doucement la mâchoire
doucement
et il grince des dents doucement
car le monde se paye sa tête
et il ne peut rien contre ce monde
et il compte sur ses doigts un deux trois
un deux trois
cela fait trois jours qu’il n’a pas mangé
et il a beau se répéter depuis trois jours
Ça ne peut pas durer
ça dure
trois jours
trois nuits
sans manger
et derrière ces vitres
ces pâtés ces bouteilles ces conserves
poissons morts protégés par des boîtes
boîtes protégées par les vitres
vitres protégées par les flics
flics protégés par la crainte
que de barricades pour six malheureuses sardines…
Un peu plus loin le bistrot
café-crème et croissants chauds
l’homme titube
et dans l’intérieur de sa tête
un brouillard de mots
un brouillard de mots
sardines à manger
oeuf dur café-crème
café arrosé rhum
café-crème
café-crème
café-crime arrosé sang !…
Un homme très estimé dans son quartier
a été égorgé en plein jour
l’assasin le vagabond lui a volé
deux francs
soit un café arrosé
zéro francs soixante-dix
deux tartines beurrées
et vingt-cinq centimes pour le pourboire du garçon.
Il est terrible
le petit bruit de l’oeuf dur cassé sur un comptoir d’étain
il est terrible ce bruit
quand il remue dans la mémoire de l’homme qui a faim.
Le garagiste oiseleur
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La voix d’Apollinaire
Et nos amours
Faut-il qu’il m’en souvienne
La joie venait toujours après la peine
Vienne la nuit sonne l’heure
Les jours s’en vont je demeure
Les mains dans les mains restons face à face
Tandis que sous
Le pont de nos bras passe
Des éternels regards l’onde si lasse
Vienne la nuit sonne l’heure
Les jours s’en vont je demeure
L’amour s’en va comme cette eau courante
L’amour s’en va
Comme la vie est lente
Et comme l’Espérance est violente
Vienne la nuit sonne l’heure
Les jours s’en vont je demeure
Passent les jours et passent les semaines
Ni temps passé
Ni les amours reviennent
Sous le pont Mirabeau coule la Seine
Vienne la nuit sonne l’heure
Les jours s’en vont je demeure
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La colère d’IAM
Si tu pouvais voir ce qui brûle dans mon thorax
J’ai pas eu l’parcours de pt’its cons dans la hype, non
Adolescent j’étais pas le king de la night, non
On trainait près des bars à pute à deux pas du Pussycat
J’ai embrassé la nuit sur ses lèvres
Et la rue m’a pris par la main
Elle a fait d’moi un putain d’bon élève
Debout jusqu’à la fin
J’ai pris les blocs qui m’entouraient
Au fil de l’épée avec mes mains comme Saladin
Pourquoi confier mes s’crets
Dans le boulot tête claire
Mon imagination j’laisse faire
J’suis c’que l’rap a créé d’plus solide
Tu t’pêtes le dos sur deux pignons d’olives
Y’a pas d’amour ici, cette guerre à plein régime
Régie par les lois du bitume qu’importe les origines
Où le sens de la vie s’est égaré dans la brume
Où les p’tits ne savent pas poser un nom sur un légume
Au coeur du pire ennui j’ai posé ma balise
Élaboré mon plan attendant que Dieu me l’avalise
Depuis dans c’pré où les vassaux me tolèrent
J’écris un peu tous les jours les raisons de ma colère
Que la terre où l’on marche est labourée par des molaires
[Shurik’n]
J’ai toujours le feu depuis l’jour où j’ai croisé sa route
J’ai appris à voir dans le noir et occis tous les doutes
On a voulu m’parquer mais j’ai flairé le piège à loup
Et la passion m’a enlevé et élevé comme une louve
J’ai remonté l’courant jusqu’à ce qu’une autre porte s’ouvre
Il m’fallait un ailleurs là bas ça sentait trop le souffre
Par manque d’envie combien des nôtres croupissent dans les douves
Laisse moi traîner ma plume sur cette route immaculée
Semer les graines les plus dures les mots les plus ciselés
Sans but, isolé, déçu, l’abandon les recrute
Et le vide les attend pour les faire rissoler
J’suis désolé
C’est pas ma faute si les esprits les plus durs
Commencent à vaciller sous l’poids de leur bracelets
Du coup le monde s’arrête là au coin de la rue
Et ça tombe dans l’facile, ça grossit les statistiques
Ça fait des choix douteux aux moments les plus fatidiques
Aucun exemple à l’horizon la place est désertique
Il en faut peu aux affamés pour brûler leurs principes
A force d’entendre qu’on était bons à rien
Beaucoup ont fini par le croire
Quoi ? Pourquoi je serre les dents ?
Mais qu’est ce que tu veux que je fasse d’autre ?
Je veux pas me faire avaler
Y’a une goutte d’avenir à glaner
Laisse moi foncer droit dessus au lieu de rester assis à râler
Trop de barrières, moi je veux les voir les vertes vallées
Si je fatigue c’est le courage qui va me chaler, aller
Maintenant j’ai plus le temps, les aiguilles tournent vite
J’suis personne aucun être sur terre ne me fera taire
Sur ma feuille j’étale toutes les raisons de ma colère
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La Marseillade de Djam Deblues
LA MARSEILLADE
(Djam Deblues)
Allez minots de la Marsiale
Aujourd’hui on va se gaver
Entre nous plus de linge sale
Dans l’anis on va le laver ! (bis)
Tu captes qu’après Marignane
Brament les nervis à Le Pen
Ils croivent qu’à la ouaneguène
Y vont t’escaner sans castagne !
Zarmas sacs-de-vin
Contre ces nazillons
Buvons chantons !
Du jaune pur
Et des microsillons !
Y nous cherchent ou quoi ces comiques ?
Gaou-galines ou bien plus pire
Y se croient des bombes atomiques
Esprès qu’on s’esplose de rire ! (bis)
Marseillais t’as pas de manières
Que tu les veux dans ta cité
Et de les laisser méditer―ranée
De nous escamper en galère !
Qué ! rien qu’un rien de nazillards
Font les crabes dans le panier ?
Qué ! ces sinistres allumards
Veulent nous prendre à la contrée ? (bis)
Ho Bonne-Mère ! retiens-moi
Y me monte le rouge au front
Du temps qu’ils tapent le carton
Nous on coupe les reines et les rois !
Tressudez faïous de la fève
Ou allez vous néguer aux Goudes !
Parce que des fois que si je me lève
Mais d’abord je lève mon coude ! (bis)
Comme on voit double hè bé mon vier
Te casse qu’on verse sous la table
On vous met deux fois plus minables
A brouméger sur vos souliers !
Marseillais on va être brave
On va pas les tuer beaucoup
Juste se les empéguer grave
Avant de s’empéguer entre nous ! (bis)
Mais ces cousins d’Adolphe Thiers
Tant y préfèrent mieux qu’on leur prête
De suite nos téléfounettes
Pour pouvoir appeler leurs mères !
Amour violent pour le pastis
Qui voudrait nous lever nos verres ?
Liberté ma belle saucisse
Laisse-nous de tuer le ver ! (bis)
Sous nos casquettes les cigales
Tchatchatchatchatchent avé l’assent
Pour qu’ils leur vient avant longtemps
Les bras qui rapetissent et la gale !
On va pas chercher un travail
Déjà que les jeunes en ont pas
C’est pas qu’on serait des brancaïs
Mais tu nous vois marcher au pas ? (bis)
Et si on quitte le Ricard
Gisclant du bar de la Marine
Ceux-là qui partent en biberine
Y vont nous tanquer Marine au bar !
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Djamil, le croco de Florence
« Nous sommes la bande des singuliers :
Les singuliers au pluriel.
Nous sommes des animaux anormaux :
Drôles, insolites, étranges, rigolos,
Hors-séries et numéros spéciaux.
Nous évoluons en dehors des normes :
Petits, bizarres, chelous, énormes,
Nous ne sommes pas des copies conformes.
Nous sommes des types atypiques,
Particuliers, distingués, uniques :
Pour trouver ton identité, pas besoin d’être identique !
Nous sommes la bande des singuliers :
Les singuliers au pluriel.
Si tu as peur de te tromper,
Peur de tout rater,
Peur de décevoir,
Peur du vide, du noir,
Peur du ridicule,
Peur d’avoir l’air nul,
Peur de la solitude,
Peur de changer tes habitudes…
N’oublie pas qu’on est plus forts à plusieurs,
Qu’un pot-pourri a une bonne odeur,
Que l’on naît tous différents, originaux,
Qu’être curieux n’est pas un vilain défaut,
Que le complet est rapiécé et le parfait glacé,
Qu’un grain peut aussi être un grain de beauté,
Qu’on peut s’assembler sans se ressembler,
Que l’on fait ce que l’on peut avec ce que l’on est.
Nous sommes la bande des singuliers :
Les singuliers au pluriel… »
» Les livres de la collection « Pourquoi ? » se lisent à plusieurs mains. C’est
pourquoi ils portent le dessin d’un livre ouvert contenant une grande main et
une petite main. Ils peuvent être lus aux petits tant qu’ils ne savent pas lire. Ils
peuvent être lus avec les petits quand ils se mettent à lire. Ils peuvent être lus
par les petits lorsqu’ils sont devenus grands et même très grands. Ils donnent
naissance aux « Pourquoi ? » des petits. Ils permettent aux grands de disposer
de quelques réponses. »
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Le son du Quintet de rue
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Les mots de Victor Gélu
Quand vas debarcar de matiera,
Lei mestres de ta saboniera
Que t’an de lois lei plens pairòus.
Encar ti duves creire uròs
Se ti ronhon pas la jornada !
Lei traitres, emé son tetar-doç,
Ti l’empunhon sensa pomada,
Sensa pomada !
(Traduction)
Maure, ils te donnent trente sous,
Quand tu vas débarquer de la soude
Les maîtres de ta savonnière
Qui ont des louis plein leurs chaudrons.
Encore tu dois t’estimer heureux
S’ils ne te rognent pas sur ta journée!
Les traîtres, avec leur ton mielleux,
Te l’enfoncent sans pommade,
Sans pommade !
M’es de latin, ieu, son babot :
Mon engien de lònga li clava ;
E sovent pensi : qunei cavas !
Jamai ajustar lei doei bots !
Aqueu trafic pòu plus durar :
Fau que sange vò que tot pete !
Lo tròn de Dieu lei va curar ;
Gara ! Que Moro si li mete ;
Voei, si li mete !
(Traduction)
C’est pour moi du latin, leur blabla :
Mon esprit constamment s’y perd ;
Et souvent je pense : quelle histoire !
Ne jamais joindre les deux bouts !
Ce trafic ne peut plus durer :
Il faut que ça change, ou que tout pète !
Le tonnerre de Dieu va les creuser ;
Gare ! Que Maure s’y mette ;
Oui, il s’y met !
Ô vous les grands politiciens qui trustez les antennes,
Vous qui menez la grande course au galop dans la plaine,
Vous tenez nos vies d’une main et il faut qu’on la ferme,
De l’autre vous purgez nos bourses et les vôtres sont pleines,
Joindre les deux bouts est devenu un vrai casse-tête,
Combien de familles d’ouvriers croulent sous les dettes,
Combien de papets sont dans la misère à la retraite,
Vivement qu’un de ces quatre matins déboule,
Lo grand tramblament.
Se jusqu’ara ai agut, rascàs,
La fava sensa joissuras,
Qu’au mens doni ma mordidura
Sus lo roiaume dei richàs !
Ieu siáu juste, pas tot per un !
Es nautrei que lauram la rega,
Puei apanaus e comolum,
V’arrapatz tot ! D’aise colega !
D’aise colega !
(Traduction)
Si jusqu’à cette heure j’ai eu, teigneux,
La guigne sans jouissances,
Qu’au moins je donne mon coup de dent
Sur le gâteau des rois des richards !
Moi, je suis juste : pas tout pour un !
C’est nous qui creusons le sillon,
Puis, boisseau et mesures combles,
Vous empoignez tout ! Doucement, les gars !
Doucement, les gars !
Ô vous patrons et financiers qui grimpez aux échelles,
Vous qui montez et démontez, encaissant à la pelle,
Vous gérez nos vies d’une main et on tient la truelle,
De l’autre vous misez en bourse et partez aux Seychelles,
Quand dans le pays résonne le courroux des précaires ;
Tous vos profits font écho à nos découverts bancaires,
Un sentiment de fatalité lié à la galère,
Vivement qu’un de ces quatre matins déboule,
Lo grand tramblament.
Cu n’a ne’n mete : aquí la lei !
La trompetarem dins la França
En esparpalhant la finança,
Porrà pitar, lo pichon peis.
Se París si vòu pas clinar
L’a lei pegons dei jorns de festa ;
Se Marsilha vòu reguinar,
Brulam lo pòrt, e copa testas !
E copa testas !
(Traduction)
Qui en a en mette ! Voilà la loi !
Nous la trompetterons dans la France !
En éparpillant la finance,
Il pourra mordre, le petit poisson.
Si Paris ne veut pas s’incliner
Il y a les torches des jours de fêtes ;
Si Marseille veut rechigner,
Nous brûlons le port, et coupe têtes !
Et coupe têtes !
Fòra ! Lo sang que nos resta a lo bòlh !
Fòra ! Sangsucs, qu’avètz la gòrja plena !
Fòra ! Bochiers, gras de nòstra codena !
Fòra ! A son torn lo bestiau pren lo foeit !
(Traduction)
Dehors ! Le sang qui nous reste bouillonne !
Dehors ! Sangsues, qui avez la gorge pleine !
Dehors ! Bouchers, gras de notre couenne !
Dehors ! À son tour le bétail prend le fouet !
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