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Gilbert, mon ami sourd et muet, parle de sa vie, de son passé et de son présent

Gilbert, bientôt 60 ans que je l’appelle Gilou. C’est mon ami de Bauduen. Nous nous retrouvons tous les étés depuis l’enfance dans ce petit village du Haut-Var où nous avons nos racines. Avec Gilbert, depuis toujours, nous nous comprenons, nous parlons, nous échangeons, nous partageons. Gilou, c’est un ami toujours gentil, attentif, curieux des autres. Gilou a accepté de me parler de sa vie. Je lui en suis très reconnaissant. Après l’enfance et le travail, il a aussi parlé de sa surdité, des oiseaux, du foot et de Bauduen, ce village de coeur que nous avons en partage. Un immense merci à lui.

Voici notre dialogue.

Eric. – Tu es allé à l’école où ?

Gilbert. À Villefranche-sur-Mer près de Nice. De trois ans à huit ans. Après, à Marseille, à l’Institut de sourds et muets, à côté de Notre Dame de la Garde. En dessous.

E. – Et qu’est-ce que tu apprenais dans cet Institut ?

G. – à parler, à écrire, le langage des signes, des gestes. Après j’ai réussi mon certificat d’études et puis j’ai été apprenti menuisier jusqu’au CAP. J’avais 17 ans. Ensuite, j’ai travaillé aux Chantiers Navals de La Ciotat. Menuisier-ébéniste dans les ateliers. Il y avait de beaux bateaux. Et puis avec mes camarades, nous formions une bonne équipe. EN 1987, les Chantiers ont fermé et j’ai été licencié pour raisons économiques. Ensuite, j’ai trouvé du travail à l’Institut des Sourds et Muets à Marseille. Aux Camoins. Comme homme d’entretien. Jusqu’à la retraite.

E. Depuis tout petit tu n’entends pas ?

G. Non. Rien. Depuis ma naissance je suis sourd.

E. Et est-ce que tu arrives à imaginer le son ?

G. Je ressens les vibrations lorsque je suis en boîte de nuit. Je n’entends pas le klaxon des voitures mais je ressens les vibrations du feu d’artifice dans le corps.

E. Ce silence, c’est comment ?

G. C’est une habitude. Je vois d’avantage. Je suis plus attentif. La nuit, c’est difficile. Surtout l’équilibre. Toi tu vois, tu entends et tu avances. Pour moi qui n’entends pas, la nuit c’est difficile.

E. Est-ce que tu arrives à imaginer le chant des oiseaux ?

G. Non, je n’arrive pas. Je ne les entends pas. Les oiseaux, je les vois voler et puis c’est tout. Avec les gens, la communication est difficile. J’écris sur mon portable. Je communique par sms mais c’est difficile.

E. Tu as des copains, des amis ?

G Oui, des amis qui sont sourds et muets aussi. À Toulon, à Marseille, à Nice. A La Ciotat j’ai des amis qui entendent et j’arrive un peu à parler avec eux.

E. Tu aimes le foot aussi, je crois

G. Oui, Je jouais quand j’étais jeune. Maintenant, c’est fini, je ne joue plus. J’ai soixante ans.

E. Tu le regardes maintenant, le foot !

G. Oui, je suis supporter de l’OM.

E. Et sinon, tu viens souvent à Bauduen ?

G. Oui, je viens voir ma famille. Ma maman. Je l’aide à entretenir la maison. J’aime être à Bauduen. C’est calme, c’est tranquille.

E. Est-ce que tu as un rêve ?

G. Je rêve de beaucoup de choses.

E. Est-ce que tu es heureux ?

G. Je suis normal. Il y a des hauts et des bas, ça dépend des jours. Mais c’est difficile d’être sourd. C’est dur. Quand je regarde la télévision par exemple. C’est difficile.

E. Tu lis des livres ?

G. Oui, un peu. Je suis sur l’internet. J’ai des amis. On se parle en chat vidéo. Nous échangeons avec le langage des signes. Bauduen, c’est calme. Je suis content d’y revenir. La nature, les gens. Je me baigne dans le lac. Je vais à la plage. Bientôt j’irai à la plage.

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La fontaine, les hirondelles du soir et la marche dans la colline de Bauduen

À l’entrée du village, avant-hier soir, le ballet des hirondelles au-dessus des toits et entre les façades. À l’écart, la vieille fontaine poursuit son chant. Rarement tari. S’y abreuver et puis projeter de monter le lendemain vers la colline par Saint-Sauveur. C’était la promenade préférée de ma grand-mère Zoé. Toujours à l’abri du mistral.

Une balade, donc hier.  Sous le soleil revenu. Le piano de Philippe Glass en tête, suivre le chemin qui mène au plateau tout là-haut sous les nuages chantilly. Chênes, cailloux et fleurs bleues dont j’ignore le nom. Et ce parfum de collline que nulle photo ne sait rendre. Il n’a pas varié depuis l’enfance. Une mescle de thym et de buis.

Marche2

Et soudain, le lac de Sainte-Croix. Les Alpes de Haute-Provence, au loin. Moustiers Sainte-Marie au-delà des cimes

marche3

En redescendant vers le village, terrasses et murettes construites au temps des cultivateurs et des muletiers

Marche5

Retrouver le village au bout d’une heure et quart de balade et constater que les jardiniers bauduennois ont préparé la terre. Les semailles ne sauraient tarder.

Marche6

 

 

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Simone et Lucette, amies de 80 ans

Bauduen, dans le Haut-Var. Quelques mois qu’elles ne s’étaient pas vues. Simone, 86 ans et Lucette, ma maman, deux ans de moins. Amies fidèles. Se sont retrouvées hier dans ce village qui les réunit depuis l’enfance. Mémoire vivace.

Simone&Lucette2

Lucette

Simone&Lucette3

Simone

 

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Sous le vent nocturne, le petit port grince et claque et gémit

Bauduen sous le vent tiède et remuant. Incapable de lui donner un nom à ce vent. Il fait grincer le ponton en bois qui mène à quelques bateaux amarrrés au bord du lac. Semblent abandonnés là depuis des lustres. Je sais pourtant que non. L’été, ces petits voiliers ont droit à quelques balades vers le barrage de Sainte-Croix. 40 ans qu’il est construit ce mur de béton. Quand j’étais petit, à l’endroit où le ponton de bois grince et les drisses claquent, il y avait des champs et des vergers. Là juste en dessous. Une longue allée de marronniers aussi. La plupart des plaisanciers l’ignorent. Peut-être pour ça que le petit port gémit les nuits de grand vent.

carteBauduen

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La tourniquette de ping-pong

Bauduen. Une table de ping-pong au-dessus du lac. Les jeunes s’y retrouvent pour de longues séances de tourniquette. Bon esprit. Rigolade. Convivialité. Vive les vacances !

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Le clocher rescapé

Il sonne chaque heure et chaque demie-heure et trône tout en haut de mon village
Et dire que ce magnifique clocher a failli être inondé il y a 40 ans… Certains projets d’EDF envisageaient de faire monter l’eau du lac de Sainte-Croix jusqu’en haut du village de Bauduen. Heureusement, c’est un autre projet qui a prévalu lors de l’édification du barrage. Le village a été épargné. Le clocher a lui aussi survécu à cette opération.

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Le petit avion

Un petit avion survole notre promenade sur les hauteurs de Bauduen.
D’ordinaire, l’intrusion de bruits mécaniques en pleine nature est agressive, dérangeante, parfois insupportable.
Là, non.
Le petit avion nous fait dresser le nez vers le ciel et les oiseaux retrouvent la voix une fois qu’il s’est évanoui au loin.

L’avion (extrait)

« … L’avion ! L’avion ! qu’il monte dans les airs
Qu’il plane sur les monts, qu’il traverse les mers
Qu’il aille regarder le soleil comme Icare
Et que plus loin encore un avion s’égare
Et trace dans l’éther un éternel sillon
Mais gardons lui le nom suave d’avion
Car du magique mot les cinq lettres habiles
Eurent cette vertu d’ouvrir les ciels mobiles. »

Français, qu’avez-vous fait d’Ader l’aérien ?

Il lui restait un mot, il n’en reste plus rien. »

Guillaume Apollinaire (1880 – 1918)
Poèmes retrouvés

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L’escouranche

Depuis toujours à Bauduen, une pierre glissante nommée escouranche attire enfants et amoureux*.
Cet après-midi-là, mon petit-fils Alexandre et mon fils Marius s’en sont donnés à coeur joie.

Intégré dans le Parc Naturel Régional du Verdon, le village de Bauduen est situé au pied d’un « baou », « grotte » ou « rocher escarpé » en provençal.

*La légende veut qu’à Bauduen, si un garçon et une fille glissent la main dans la main sur l’escouranche, ils se marieront ensemble.

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